Retour au bled: Episode II – Les visas

Problématique du retour

Récemment, un ami est venu me rendre visite du bled et il m’a demandé de but en blanc ce que je faisais encore en Europe. Il me dit qu’au bled, il fait beau toute l’année, que j’ai les compétences pour obtenir facilement un poste bien en vu dans le privée. Et, cerise sur le gâteau, il me promet de travailler comme un expatrié dans mon propre pays. Bref il me vante le fait que j’aurais une meilleure hygiène de vie au bled qu’en Europe. Sincèrement, je pense que mon ami a probablement raison. Je gagnerais peut-être moins bien ma vie à travail équivalent au bled, mais les avantages sont tellement nombreux que cette perte somme toute relative de pouvoir d’achat ne devrait pas me décourager. Alors pourquoi je ne rentre pas ?
Il existe 1001 raisons que je pourrais invoquer ici pour refuser de répondre à cette question. Je pourrais parler des raisons politiques ou économiques, mais ce serait faire preuve de malhonnêteté intellectuelle que de me reposer sur ces sempiternelles arguments. Non, je vais peut-être en choquer plus d’un mais voici ma vraie raison est la suivante: Je n’ai pas/plus d’attache émotionnelle suffisamment forte avec le bled pour y rentrer et y travailler. Comment, cela vous choque ? J’en suis fort aise.
Je trouve trop facile le prétexte des personnes bien pensantes qui s’obligent à trouver des raisons toutes plus superficielles les unes que les autres pour ne pas rentrer ou pour expliquer leur échec dans leur tentative. Suis-je d’origine africaine ? Oui. Suis-je fier d’être africain ? Oui. Ai-je envie de voir l’Afrique se développer. Deux fois oui. Mais je ne suis plus qu’un simple africain. je m’estime avant tout citoyen du monde et un blédard. Et en tant que tel, où que je sois et quoi que je fasse, je serais toujours fier d’être un blédard. Je serais le premier à me lever et à défendre mes frangins blédards. Si mes conseils sont utiles et/ou censés et qu’ils permettent à d’autres blédards d’évoluer positivement je serais le plus heureux des hommes, mais n’attendait pas de moi que je rentre pour remplir une mission qui n’est pas ou plus la mienne. Ma mission est égoïstement de vivre ma vie le mieux que je peux. Et si pour cela je dois renoncer à mon retour au bled, je le fais sans état d’âme car ce n’est pas une renonciation, non c’est un choix.

Dans la même veine

21 Commentaires

ahhhh pour en discuter avec toi à chacune de nos rencontres, tu connais le profond respect que j’ai pour toi et ta position. Beaucoup ferait mieux d’etre aussi clair au lieu de chercher à developper l’afrique dans les salons europeens. Passons…
Juste une question dis moi pourquoi est ce que ce sont toujours les africains qui sont mieux ailleurs que chez eux? pourquoi sont ils toujours les seuls à se considerer comme citoyens du monde?

@Etum – Tiens, c’est vrai ce que tu dis là. En ce qui me concerne je crois que c’est surtout lié au fait que je peux redescendre au bled quand je veux peux. A partir du moment ou tu sais que tu as un plan de secours en cas de m**de l’étranger, il est très facile de prendre ses aises. Regarde comment les biblos se sentent bien au bled (lol)

À chacun de se répondre en son âme et conscience sur la question du non-retour. On peut mentir aux autres, mais on ne peut pas se mentir à soi-même.

@Etum,
Boum!
Vraiment Etum, là je te dois une bierette ou une vinette si tu préfères, c’est ce qu’on appelle en plein dans le mille. Ca c’est 2 koueshion of ze yère !!

@LPN,
en tout cas, je ne fais pas partie de ceux que ton attache émotionnelle non suffisamment forte choque.
Cela dit, on est là en présence d’un louable exemple de jonglage intellectuel, ou bien c’est moi qui voit mal? 🙂

@MastaP,
Tu m’étonnes qu’ils se sentent bien. Avec leur pouvoir d’achat et les préjugés positifs dont ils jouissent, qui ne s’y sentiraient pas bien?

@Eddy Quand j’étais étudiant je me suis retrouvé au fin fond de l’Italie dans un coin où visiblement ils avaient jamais vu de blédards auparavant. Et bien je me suis senti le temps d’un week-end comme un biblos au pays… moins le pouvoir d’achat.. hélas 😀

@Etum je pense que cela vient du fait que les blédards n’ont pas beaucoup d’autres choix. Les biblos savent que quelque soit l’endroit où il se retrouveront, ils auront toujours leur pays d’origine pour les backupper en cas de merde.
Les blédards, en revanche, une fois hors de leur bocal ne peuvent plus compter que sur eux-même. Du coup ils se raccrochent sur cette utopie de la citoyenneté universelle censée leur procurer une certaine attache solide. Et les protégés en cas de pépin puisqu’en théorie on fait tous partie de la même équipe… je dis bien en théorie.
Si tu veux le citoyen du monde fait partie du pays communauté internationale… et tu sais ce que je pense de la communauté internationale, c’est pour te dire l’illusion qui nous fait avancer 😀

Je pense que entre ceux qui sont retourné au pays, et ceux qui ont décider de ne pas y retourner (LPN), il y’a la catégorie non négligeable ceux qui « préparent le retour ». Ce qu’il y’a de remarquable c’est que cette « préparation » ( entreprendre au pays, acheter un terrain, une maison, etc…) à la fâcheuse manie de se rallonger avec le temps : les années passent , et il y’a toujours une bonne raison d’ajourner son retour définitif au pays. Au final, il y’en as pas mal qui sont en France depuis 30 ans et qui chaque jour, depuis 30 ans, prépare « activement » leur retour au pays.
Dès lors, ma question est la suivante : Est il préférable d’admettre clairement comme LPN que l’on ne retourneras pas au bled, ou est il préférable de vivre dans un l’ (illusion?) optique de la préparation au retour; sans cependant jamais véritablement retourner au bled ? En tous cas, comme dit l’adage : « L’Espoir fait vivre » .

mmhh… puis-je répondre de manière simpliste ???? Okay je me lance 😀 C’est une question d’argent. Si tu as l’argent de vivre dans l’illusion de l’optique d’un retour sans jamais repartir libre à toi. Mais si tu te rends compte que cette non décision te coûte en argent, en pouvoir d’achat en occasions manquées et ceux quelque soit ta décision finale, tu arrives à un croisement:
– soit tu persistes et tu es perdant sur tout les plans;
– soit tu choisis .. et tu perdras peut-être mais au moins tu auras essayé l’une ou l’autre des solutions;
Je pense que cela s’appelle la Vie. Le pire c’est de rester éternellement dans l’incertitude. Il faut faire des choix.. quitte à se tromper

@Eddy,
J’ai soif,

@tous,
J’etais sur que vous alliez tomber comme des mouches sur la problématique du retour, du pouvoir d’achat et autres préparation personne ne dit rien sur la citoyenneté mondiale que seule les africains semblent aimer et ce n’est pas seulement ceux de la diaspora en passant, meme mes kotas qui sont au pays se disent citoyens du monde, je wanda… a t on déja vu un biblos prendre la nationalité du bled malgré ces 30 ans passés chez nous? meme son corps n’est pas entrerré au bled. Et nous autres on parle de citoyen du monde, on se trompe encore mais bon il parait que je suis un conservateur et pas assez ouvert, je retourne chercher l’argent pour rentrer au bled.

pourquoi sont ils toujours les seuls à se considerer comme citoyens du monde?

Contre-exemple « biblos » connu : Manu Chao.

Autre contre-exemple : moi et au moins 2 de mes potes. L’un politiquement très à gauche (genre Manu Chao), l’autre intégriste libéral-conservateur, genre fan d’Alain Madelin. (non, il n’est pas en Bulgarie celui-là, et il n’a aucune dent contre les pandas). Et moi donc, troll profesionnel.

@Etum
C’est Calixte Beyala qui nous a appris ça..
Et en fait, cette citoyenneté mondiale traduit simplement un fort sentiment d’infériorité.

Quelque chose dont on ne peut / ne veut se réclamer, c’est qu’on en éprouve soit une gêne, soit une honte. Ce n’est pas compliqué.

On a honte face à un japonais ou un suédois ou un canadien d’affirmer qu’on est africain, car on en a honte face à eux.

Sous quel axe prendre l’Afrique pour en extirper une fierté que le japonais ou le suédois ou le canadien pourrait nous envier?

Hors mis la danse que personne ne nous envie, à ce jour, aucun axe ne donne satisfaction (sauf si tu as des propositions).

« pourquoi est ce que ce sont toujours les africains qui sont mieux ailleurs que chez eux? »

Parce que ce sont les bledards expatriés que tu fréquentes le plus ? Je connais pas mal de biblos qui se trouvent mieux à l’étranger que chez eux, bizarrement ils sont souvent français. Pourtant le français n’est pas genre voyageur. Mais je suis français aussi.

Truc rigolo d’ailleurs : je connais des bulgares qui se trouvent mieux en Europe de l’ouest qu’en Bulgarie et des français qui se trouvent mieux en Bulgarie que chez eux.

L’herbe est toujours plus verte ailleurs. Par ailleurs sur les grossièrement 200 pays dans le monde, il n’y a qu’une chance sur 200 que ce soit le pays qui est le tiens qui sera celui qui te conviendra le mieux.

Ou comme dit le proverbe : nul n’est prophète en son pays.

« une fierté que le japonais ou le suédois ou le canadien pourrait nous envier? »

Pourquoi tu crois qu’ils font des « safari » ?
Elle a été trouvée où Lucy -« premier homme »- ? 
Vous n’avez pas d’hiver froids et rigoureux ? (surtout valable pour la Canada).

@Etum j’ai parlé du nerf de la guerre en réponse à @Jikeb et non en réponse à ton interrogation. Et j’ai bien dis que c’était une réponse simpliste

« la citoyenneté mondiale que seule les africains semblent aimer et ce n’est pas seulement ceux de la diaspora en passant, meme mes kotas qui sont au pays se disent citoyens du monde »

Peut-être aussi parce que l’africain, pour voyager hors de chez lui, a besoin de visas pas forcemment facile à obtenir ?

A l’inverse, en « biblos-land » avoir un passeport est facile (ce qui n’est pas le cas pour un chinois par exemple), et on voyage avec très peu de formalités : http://fr.wikipedia.org/wiki/Passeport_fran%C3%A7ais
http://www.henleyglobal.com/citizenship/visa-restrictions/

« a t on déja vu un biblos prendre la nationalité du bled malgré ces 30 ans passés chez nous? »

Je ne demande pas mieux que d’avoir une nationnalité supplémentaire (la nationnalité française étant elle difficile à perdre… ). Et puis les nationnalités du bled sont quelquefois difficiles à obtenir (par exemple pour Madagascar qui fonctionne au droit du sang strict), donc ca va dépendre de la législation du pays dont tu parles.

Beaucoup de bledards, parmis les motivations pour demander la nationnalité française évoquent le fait qu’on a moins de problèmes administratifs pour voyager avec un passeport européen. Un avantage que n’a pas le « biblos » quand il demande un passeport du bled.

« meme son corps n’est pas entrerré au bled. »

Ca marche en sens inverse aussi : rares sont les étrangers vivant en France qui se font enterrer en France. (Au moins pour les maghrebins ; « 80 % des défunts musulmans sont inhumés dans leur pays d’origine. » http://elbadre.com/pompes-funebres-musulmanes.html ; même après 40 ans et tous leurs enfants en France.).

Tu vois que du monde lis ton article en dessous 🙂

Moi je voudrai parler du strip, je trouve que les changements de pupilles et d’expressions, le rendent beaucoup plus vivant ! \o/

D’accord avec toi Salagir… je remercie d’ailleurs le génial dessinateur qui m’a aidé à rendre ces changements possibles 😉 .

@Etum,
même Jesus avait dit je reviens comme ca.
Des milliards de gens l’attendent toujours depuis là..

Mince, c’est bon de savoir que d’autres ont déjà eu la même définition de Blédard que moi. Je n’ai pas la substance pour argumenter ici, mais malgré mon jeune âge j’ai moi même déjà cessé de vivre avec l’illusion que je vais rentrer vivre chez moi un jour, alors que j’adore l’Afrique. Mais je pense qu’il est nécessaire d’admettre cela avant de pouvoir prétendre aider Franchement l’Afrique.

Pour tenter de répondre à ce qui a été dit plus haut: si nous sommes les seuls à nous considérer comme citoyens du monde (ce qui est vraiment le cas), c’est sans doute parce que comme il a été dit en d’autres termes, parce qu’on ne gagne rien à s’affirmer comme citoyen africain (un merci à nos dirigeants). Pourquoi beaucoup pense que le racisme est unilatéral (biblos qui n’aiment pas les noirs) alors que c’est n’est pas ainsi? C’est tout simplement parce que de par nos positions respectives, l’impact n’est pas le même, mais la « quantité » si. Lol

Il n’y a pas besoin d’avoir une attache émotionnelle en afrique pour envisager un retour (qui d’ailleur n’a pas besoin d’être définitif), la question la plus importante à mon sens c’est que je peux faire la bas, quelles sont les opportunités d’affaires. Pensez à l’afrique en terme d’opportunité économique qu’elle represente.
Il faut absolument se défaire de cet image d’une afrique désolée où il n’y a rien à faire. Les niches potentielles d’investisment rentables sont énormes! Et cela malgrès la mauvaise gouvernance relative.

Laisser un commentaire